Commentaire du 20 janvier 2013 / Pierre Desroches (125e)

– Transcription écrite du commentaire au bas de la page. 

– Pierre Desroches est prêtre des paroisses Saint-Pierre Claver, Saint-Stanislas de Kostka et de Saint-Enfant-Jésus du Mile-End à Montréal (Québec). Il est également aumônier du Service de Police de Montréal et du CHSLD Centre-Ville de Montréal.

– Gino Fillion : composition et interprète de la musique, caméra, mixage et montage visuel.

– Références bibliques : http://aelf.org/

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Évangile : Les noces de Cana (Jean 2, 1-11)
Il y avait un mariage à Cana en Galilée. La mère de Jésus était là. Jésus aussi avait été invité au repas de noces avec ses disciples. Or, on manqua de vin ; la mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin. » Jésus lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. » Sa mère dit aux serviteurs : « Faites tout ce qu’il vous dira. » Or, il y avait là six cuves de pierre pour les ablutions rituelles des Juifs ; chacune contenait environ cent litres. Jésus dit aux serviteurs : « Remplissez d’eau les cuves. » Et ils les remplirent jusqu’au bord. Il leur dit : « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » Ils lui en portèrent. Le maître du repas goûta l’eau changée en vin. Il ne savait pas d’où venait ce vin, mais les serviteurs le savaient, eux qui avaient puisé l’eau. Alors le maître du repas interpelle le marié et lui dit : « Tout le monde sert le bon vin en premier, et, lorsque les gens ont bien bu, on apporte le moins bon. Mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant. » Tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit. C’était à Cana en Galilée. Il manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui. 

1ère lecture : Les noces de Dieu et de son peuple (Isaïe 62, 1-5)
Pour la cause de Jérusalem je ne me tairai pas, pour Sion je ne prendrai pas de repos, avant que sa justice ne se lève comme l’aurore et que son salut ne flamboie comme une torche. Les nations verront ta justice, tous les rois verront ta gloire. On t’appellera d’un nom nouveau, donné par le Seigneur lui-même. Tu seras une couronne resplendissante entre les doigts du Seigneur, un diadème royal dans la main de ton Dieu. On ne t’appellera plus : « La délaissée », on n’appellera plus ta contrée : « Terre déserte », mais on te nommera : « Ma préférée », on nommera ta contrée : « Mon épouse », car le Seigneur met en toi sa préférence et ta contrée aura un époux. Comme un jeune homme épouse une jeune fille, celui qui t’a construite t’épousera. Comme la jeune mariée est la joie de son mari, ainsi tu seras la joie de ton Dieu. 

Psaume 95, 1-3.7-10

R/ Allez dire au monde entier les merveilles de Dieu !

Chantez au Seigneur un chant nouveau,
chantez au Seigneur, terre entière,
chantez au Seigneur et bénissez son nom !

De jour en jour, proclamez son salut,
racontez à tous les peuples sa gloire,
à toutes les nations ses merveilles !

Rendez au Seigneur, familles des peuples,
rendez au Seigneur la gloire et la puissance,
rendez au Seigneur la gloire de son nom.

Adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté.
Allez dire aux nations : « Le Seigneur est roi ! »
Il gouverne les peuples avec droiture.

2ème lecture : Diversité des charismes dans l’unité (1 Corinthiens 12, 4-11)
Frères, les dons de la grâce sont variés, mais c’est toujours le même Esprit. Les fonctions dans l’Église sont variées, mais c’est toujours le même Seigneur. Les activités sont variées, mais c’est toujours le même Dieu qui agit en tous. Chacun reçoit le don de manifester l’Esprit en vue du bien de tous. À celui-ci est donné, grâce à l’Esprit, le langage de la sagesse de Dieu ; à un autre, toujours par l’Esprit, le langage de la connaissance de Dieu ; un autre reçoit, dans l’Esprit, le don de la foi ; un autre encore, des pouvoirs de guérison dans l’unique Esprit; un autre peut faire des miracles, un autre est un prophète, un autre sait reconnaître ce qui vient vraiment de l’Esprit ; l’un reçoit le don de dire toutes sortes de paroles mystérieuses, l’autre le don de les interpréter. Mais celui qui agit en tout cela, c’est le même et unique Esprit : il distribue ses dons à chacun, selon sa volonté.

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Commentaire du 20 janvier 2013 (128e) – 2e dimanche du Temps Ordinaire (année C – Saint Luc)
Transcription : Sœur Cécile Petit, s.c.q.

À Cana, Marie nous initie à être des serviteurs de Dieu

L’abbé Pierre Desroches

Alors mes amis, les textes d’aujourd’hui nous mettent dans un contexte  nuptial. Et la première lecture qui est tirée du livre d’Isaïe nous dit ceci : « Pour la cause de Jérusalem je ne me tairai pas, pour Sion je ne prendrai pas de repos, avant que sa justice ne se lève comme l’aurore et que son salut ne flamboie comme une torche. » Alors, on ne peut pas dire que le Seigneur n’est pas décidé à nous donner ce qui, pour Lui, est un droit pour nous, un contexte de dignité où la justice n’est pas nécessairement le type de justice que nous connaissons mais la sienne, et qu’elle puisse régner, et puisse faire que dans tout l’univers on sente qu’on est épousé.

Quand je lis cette lecture, j’aime à me rappeler un moment de ma vie et particulièrement cet extrait qui dit ceci : « Tu seras une couronne resplendissante entre les doigts du Seigneur, un diadème royal dans la main de ton Dieu. On ne t’appellera plus : « La délaissée », on n’appellera plus ta contrée : « Terre déserte », mais on te nommera : « Ma préférée », on nommera ta contrée : « Mon épouse ». Ça me rappelle les moments qui se sont passés pour moi entre le Collège et le Grand Séminaire de Montréal où je me requestionnais sur mon engagement à devenir prêtre et que j’avais un sentiment profond que la terre d’ici avait été délaissée et abandonnée. J’avais touché cela dans un lieu très concret parce que je gardais des bâtiments du Sanctuaire Marie-Reine-des-Cœurs qui se trouve à Chertsey pendant que le frère Benoît était parti trois semaines avec  le Cardinal Léger en Afrique. Et moi, j’étais dans un moment d’hésitation et je gardais ces lieux pendant son absence et je méditais beaucoup sur mon avenir et ma vocation. Et j’étais tombé sur le livre de Marguerite d’Youville qui nous contait son histoire – une biographie – et après avoir lu le livre de Marguerite d’Youville, j’avais eu le sentiment profond qu’au moment où elle avait été en service sur cette terre, que le Seigneur, et particulièrement le Père, parce qu’elle avait une grande dévotion au Père, Il lui avait été excessivement présent, et qu’à travers elle il avait épousé cette réalité de Montréal. Je me souviens, après la lecture de cette vie, de m’être adressé aux fondateurs de Montréal en disant : « vous avez tous dans vos entrailles cette terre pour laquelle vous avez livré votre vie et vous l’avez fait dans la présence de Dieu. Comme vous êtes là et comme votre expérience peut me dire que Dieu est toujours là, moi aussi, je fais le pas et je m’embarque. » Ça été un moment décisif, on était comme en décembre ou janvier à ce moment-là, et je suis entré au Grand Séminaire au mois de septembre qui a suivi, après avoir terminé quelques cours qui me manquaient.

Quand je relis ce texte d’Isaïe, je m’aperçois qu’il fait appel pour moi à une dimension ou à une réalité qui est très proche de moi, toute l’évolution de Montréal.  Montréal qui s’est détourné de la présence de son Dieu qui lui a été excessivement présent dans tout le développement de son histoire puisque  Montréal a été un désir clairement exprimé à travers la Vierge et particulièrement à cet homme que j’aime bien qui s’appelle, Jérôme Le Royer de la Dauversière. Évidemment, pour retrouver le chemin de cette élection, de cet épousailles d’aller ouvrir son cœur. De se sentir délaissé, c’est une réalité, mais de reconnaître qu’on ne l’est pas, c’est une autre et ça demande l’adhésion de notre volonté pour s’ouvrir. Il faut s’ouvrir à la présence de Dieu qui est là et de le découvrir à travers des signes, non pas d’un nombre, d’une grande pratique religieuse, mais à travers des signes très concrets d’un amour qui se laisse découvrir par des cœurs qui le cherchent.

Dans la deuxième lecture aujourd’hui, ça va être notre ami Paul qui va nous parler des charismes, des dons de chacun et comment tous ces dons-là vont contribuer à la construction du corps. J’aime bien m’imaginer que du haut du ciel le Seigneur ne décide pas de donner un don à droite, puis un don à gauche, de cette manière-là. Moi, je pense que profondément les dons nous arrivent à travers des expériences, à travers des réalités qui sont les nôtres à dans lesquelles on fait l’expérience de la rencontre de Dieu. Ayant traversé les épreuves, ayant traversé la mort par son Esprit, il y a un don qui se développe dans la vie des uns ou dans la vie des autres. J’ai un cousin qui était sourd, et évidemment, il ne parlait pas puisqu’il n’entendait pas les mots, il n’entendait pas les paroles, et une de ses filles a développé le don de parler en signes et a même enseigné les signes à l’Université de Montréal. Elle est comme dans ce langage, c’est comme sa langue maternelle, sa langue paternelle puisque son père et sa mère étaient tous les deux sourds, et ce don-là lui vient de son histoire. Il vient de l’accueil qu’elle a fait, de la réalité différente de ses parents, et son grand désir de communiquer avec eux a fait qu’elle a pu développer ce langage et aussi rejoindre beaucoup de leurs semblables. Je pense que c’est souvent le cheminement de nos dons qui nous viennent de l’Esprit Saint qui n’est pas un esprit qui fait qu’on est découragé, diminués mais un esprit qui fait qu’on se lève, qu’on est combattifs, qu’on accepte de donner de nous-même et de mettre courage et force pour traverser les épreuves.

Quel beau texte dans l’Évangile qui nous parle des Noces de Cana. Beaucoup se rappellent souvent que Jésus a changé l’eau en vin mais je pense que le texte est beaucoup plus profond que vouloir juste nous exprimer ce miracle à un niveau matériel. La mère de Jésus dit : « Ils n’ont plus de vin. » Souvent le vin est le symbole de la joie. Ne pas avoir de vin c’est être sur le point de manquer de joie, de manquer de souffle, de manquer de vie. Jésus va lui dire : « Femme, mon heure n’est pas encore venue. »  J’aime beaucoup entendre cette expression parce que pour moi derrière cette expression j’entends : si l’heure de Jésus n’est pas venue, l’heure de la femme est arrivée. L’heure de la femme ça va être dans ce beau texte, à mon avis, l’heure où elle va initier les disciples pour qu’ils deviennent eux aussi, comme elle, des serviteurs. De même qu’elle avait dit à l’Annonciation : « je suis la servante du Seigneur, qu’il m’advienne selon ta Parole, » elle va dire aussi à ces serviteurs : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le. » Elle va les initier à être les serviteurs. Et Jésus dit : « remplissez d’eau ces jarres, ces cuves » des jarres qui étaient presque vides. Nous aussi, dans notre expérience concrète et réelle, la vie peut nous épuiser. On peut être rendus avec quelques mesures, sur le bord d’une dépression, parce quand on n’a plus de mesure du tout, on s’effondre, on s’affaisse. Alors « remplissez d’eau ces jarres », c’est « mettez de la vie en abondance. Et qui sont ces serviteurs qui viennent nous remplir dans ce texte-là, de la Parole de Dieu, de la Parole de Jésus. »

La deuxième Parole que Jésus leur dit c’est : « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » On a pu nous remplir d’enseignements catéchétiques, on a pu nous remplir de transmission, de connaissances de la foi, si on ne va jamais puiser dans ce trésor, il reste comme une terre déserte, il reste comme un désert, il ne donne pas la vie. « Puiser », c’est aller vous enrichir de ce que vous avez reçu, de ce dont on vous a rempli, et « portez-en au maître du repas. » Je pense que, comme évangélisateur, ce que nous avons à aller porter, ce n’est pas d’abord notre propre vie, notre propre expérience, mais c’est la réalité même de Dieu. Et le « maître du repas », ce sont ces hommes, ces femmes qui vont avoir à accueillir, à entrer dans ce banquet qui peut être comme le banquet eucharistique. Être capables de le recevoir pour nous aussi, être en action de grâce, être en reconnaissance. « Ils  lui en portèrent. » Et là on a eu comme deux verbes qui sont des verbes de maternité. Le premier, c’était « remplir », le deuxième, c’est « porter ». Et on va avoir maintenant cette chose étonnante, le maître qui goûte l’eau changée en vin, qui ne sait pas d’où il vient puisque ce n’est pas lui qui s’est épuisé à remplir les jarres mais qui va reconnaître la saveur, l’inédit de ce qui lui est offert. « Tout le monde sert le bon vin en premier, et, lorsque les gens ont bien bu, on apporte le moins bon. Mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant. » Ce n’est pas dans le passé que se trouve notre plénitude, mais c’est dans ce « maintenant » de nos jours et dans ce « maintenant » de l’Église que nous sommes appelés à faire l’expérience et  à la  reconnaissance de ce qui est le meilleur. « Tel fut le commencement des signes ». On peut dire que c’est le jour où les disciples sont passés de simples invités à une noce et sont devenus des témoins et ils se sont mis à croire. J’espère que tous ces enseignements qu’on a reçus dans notre vie nous ont fait vivre ce même passage d’être des invités à devenir croyants.

Évangile : Jean 2, 1-11

1ère lecture : Isaïe 62, 1-5

Psaume 95, 1-3.7-10

2e lecture : 1 Corinthiens 12, 4-11

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