Commentaire du 1er avril 2012 / Pierre Desroches (84e)

– Transcription écrite du commentaire au bas de la page. 

– Pierre Desroches est prêtre des paroisses St-Pierre Claver et St-Stanislas de Kostka de Montréal. Il est également aumônier du Service de Police de Montréal et du CHSLD Centre-Ville de Montréal.– Gino Fillion : caméra, composition de la musique et montage.

« L’homme qui se laisse instruire c’est celui qui est conscient qu’il ne sait pas tout / Le verbe « écouter » nous dit le chemin pour devenir un véritable être humain / L’abaissement du Christ est une réalité que l’on est appelé à vivre dans notre existence / Le messianisme du Christ est fait d’humilité. »

– Références pour les textes bibliques (AELF) : http://aelf.org/?date_my=01/04/2012

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Évangile : Entrée messianique du Seigneur à Jérusalem (Marc 11, 1-10)
Quelques jours avant la fête de la Pâque, Jésus et ses disciples approchent de Jérusalem, de Bethphagé et de Béthanie, près du mont des Oliviers. Jésus envoie deux de ses disciples : « Allez au village qui est en face de vous. Dès l’entrée, vous y trouverez un petit âne attaché, que personne n’a encore monté. Détachez-le et amenez-le. Si l’on vous demande : ‘Que faites-vous là ?’ répondez : ‘Le Seigneur en a besoin : il vous le renverra aussitôt.’ » Ils partent, trouvent un petit âne attaché près d’une porte, dehors, dans la rue, et ils le détachent. Des gens qui se trouvaient là leur demandaient : « Qu’avez-vous à détacher cet ânon ? » Ils répondirent ce que Jésus leur avait dit, et on les laissa faire. Ils amènent le petit âne à Jésus, le couvrent de leurs manteaux, et Jésus s’assoit dessus. Alors, beaucoup de gens étendirent sur le chemin leurs manteaux, d’autres, des feuillages coupés dans la campagne. Ceux qui marchaient devant et ceux qui suivaient criaient : « Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni le Règne qui vient, celui de notre père David. Hosanna au plus haut des cieux ! » 

1ère lecture : Le Serviteur de Dieu accepte ses souffrances (Isaïe 50, 4-7)
Dieu mon Seigneur m’a donné le langage d’un homme qui se laisse instruire, pour que je sache à mon tour réconforter celui qui n’en peut plus. La Parole me réveille chaque matin, chaque matin elle me réveille pour que j’écoute comme celui qui se laisse instruire. Le Seigneur Dieu m’a ouvert l’oreille, et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui m’arrachaient la barbe. Je n’ai pas protégé mon visage des outrages et des crachats. Le Seigneur Dieu vient à mon secours ; c’est pourquoi je ne suis pas atteint par les outrages, c’est pourquoi j’ai rendu mon visage dur comme pierre : je sais que je ne serai pas confondu. 

Psaume 21, 8-9, 17-20, 22-24

R/ Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?

Tous ceux qui me voient me bafouent,
ils ricanent et hochent la tête :
« Il comptait sur le Seigneur : qu’il le délivre !
Qu’il le sauve, puisqu’il est son ami ! »

Oui, des chiens me cernent,
une bande de vauriens m’entoure.
Ils me percent les mains et les pieds ;
je peux compter tous mes os.

Ils partagent entre eux mes habits
et tirent au sort mon vêtement.
Mais toi, Seigneur, ne sois pas loin :
ô ma force, viens vite à mon aide !

Mais tu m’as répondu !
Et je proclame ton nom devant mes frères,
je te loue en pleine assemblée.
Vous qui le craignez, louez le Seigneur. 

2ème lecture : Abaissement et glorification de Jésus (Philippiens 2, 6-11)
Le Christ Jésus, lui qui était dans la condition de Dieu, n’a pas jugé bon de revendiquer son droit d’être traité à l’égal de Dieu ; mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement, il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à mourir, et à mourir sur une croix. C’est pourquoi Dieu l’a élevé au-dessus de tout ; il lui a conféré le Nom qui surpasse tous les noms, afin qu’au Nom de Jésus, aux cieux, sur terre et dans l’abîme, tout être vivant tombe à genoux, et que toute langue proclame : « Jésus Christ est le Seigneur », pour la gloire de Dieu le Père.

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Commentaire du 1er avril (84è) – Dimanche des Rameaux (année B)
Transcription : Sœur Cécile Petit, s.c.q.

Un messie à dos d’âne reconnu pour sa grandeur du dedans

L’abbé Pierre Desroches

Cette semaine j’ai hâte de vous lire la première phrase qui me parle beaucoup, qui me rejoint dans une expérience qui est la mienne depuis fort longtemps : « Dieu mon Seigneur m’a donné le langage d’un homme qui se laisse instruire, pour que je sache à mon tour réconforter celui qui n’en peut plus. » L’homme qui se laisse instruire, c’est l’homme qui est conscient qu’il ne sait pas tout et qu’il est toujours en situation d’apprentissage, et que celui qui est le grand enseignant, c’est Dieu. « Celui qui a un langage d’homme qui se laisse instruire, » c’est celui dont la langue parle de Dieu en vérité. Et ce n’est pas pour se faire valoir, ce n’est pas pour devenir une vedette, c’est  pour qu’il puisse à son tour réconforter celui qui n’en peut plus. C’est une réalité très pastorale d’accueillir, d’écouter celui qui est à bout de souffle pour l’aider à retrouver le souffle de Dieu qui est en lui et dont il est coupé, s’il est maintenant épuisé. C’est un langage qui conduit à retrouver la source.

« La Parole me réveille chaque matin, », non simplement elle me réveille chaque matin mais je peux dire que parfois elle vient habiter mes insomnies, elle vient m’empêcher de sombrer, elle vient dissiper les ténèbres qui peut-être rendent plus pénible mon sommeil.  « Chaque matin, elle me réveille pour que je l’écoute. » Ce verbe extraordinaire qui est au tout début de la Bible et qui est presque celui qui nous dit le chemin pour devenir un humain : ÉCOUTER« Écoute Israël. » Quand je n’écoute pas, c’est que je suis coupé et je suis donc replié, renfermé. Et celui qui n’écoute pas va difficilement éviter l’état de révolte.

Et « le Seigneur m’a ouvert l’oreille,  je ne me suis pas révolté », parce que si mon oreille s’était fermée, je me serais révolté. Je ne me suis pas dérobé… cette grande tentation de toujours ne pas être responsable, sentir toujours que les situations ou qu les réalités ne me concernant pas, et passer à côté. « J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient – assez particulier comme expression – et mes joues à ceux qui m’arrachaient la barbe. » Pour plusieurs d’entre vous, ça risque d’être difficile, pour moi c’est possible de vivre cette expérience. Mais qu’est-ce que la Parole veut nous dire ? Souvent nos désengagements sont un refus de recevoir les coups qui ne sont pas nécessairement physiques, et ce ne sont pas nécessairement les coups physiques qui nous font le plus mal. De se faire tirer la barbe, ce n’est pas à prendre au premier degré. C’est de présenter notre vulnérabilité. C’est beaucoup plus le sens de cette parole.

«  Je n’ai pas protégé mon visage des outrages et des crachats. » C’est un être qui est complètement, qui se risque entièrement. « Et c’est le Seigneur qui vient à mon secours ». C’est Lui qui va donner sens, c’est Lui qui va faire que je ne serai pas détruit car si j’évite mes charges et mes responsabilités la destruction ne sera peut-être pas physiquement souffrante mais elle sera sûrement souffrante sur le plan de mon être et je n’aurai pas expérimenté le secours du Seigneur. « C’est pourquoi je ne suis pas atteint par les outrages, et que j’ai rendu mon visage dur comme pierre. » Vous remarquerez que c’est le visage et non pas le cœur. « Je sais que je ne serai pas confondu. » La confiance, elle est nettement placée dans le Seigneur et cette parole nous donne presque une  façon de vivre au quotidien, elle nous appelle à ce lien fondamental qui va faire de nous vraiment un humain au plein sens du terme.

Et on retrouve ça dans la deuxième lecture aux Philippiens quand on va nous  parler de Jésus qui s’est abaissé. L’abaissement du Christ, c’est une réalité qu’on est appelé à risquer dans plusieurs moments de notre existence. On n’est pas appelé à prendre les choses de haut, à se croire au-dessus. Il y a des situations et des réalités qui souvent nous dépassent et qui nous appellent à ce sain abaissement qui va nous faire découvrir lorsqu’on se sera bien abaissé, cette présence du Christ qui est beaucoup plus bas que chacune de nos élévations, et que lorsqu’on le rencontre dans nos abaissements, il nous relève et nous redresse. Et c’est là que s’expérimente la gloire du Père.

Et on entre dans l’Évangile : l’entrée  messianique de Jésus à Jérusalem. Il dit à ses disciples : «  Allez au village qui est en face de vous, vous allez trouver un petit âne, que personne n’a encore monté. » On va découvrir dans cet évangile des signes discrets d’une forme de messianisme qui avait été annoncée. Entrer avec un grand cheval, avec une belle cavalerie, ceci appartient plus aux rois, aux forts, aux puissants. Le messianisme que va nous proposer et annoncer Jésus est un messianisme beaucoup plus discret, beaucoup plus humble. Il va entrer avec un petit âne. On s’attend toujours que les grands directeurs de compagnie nous arrivent en Cadillac ou en Mercédès ou nous arrive dans une belle monture qui est de grand prix. Quelqu’un  qui nous arriverait avec une voiture d’une grande humilité, il n’y a pas grand monde le prendrait au sérieux.

Dans cette page d’évangile on voit que dans cette entrée très humble sur un petit âne, beaucoup de gens vont couvrir la route de leurs manteaux. La grandeur qu’ils vont reconnaître ce n’est pas la grandeur du dehors c’est la grandeur du dedans de Celui qui vient ici par ce chemin d’humilité. Et on va entendre ce chant : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, béni le règne qui vient de notre père David. Hosanna au plus haut des cieux ! » Il y a tout un peuple au temps de Jésus, il y a une multitude qui a  reconnu en lui le messianisme, et ce n’est pas cette même multitude qui l’a fait crucifier, c’est une autre; mais il y a eu au temps de Jésus cette reconnaissance. Alors que ce soit pour nous l’occasion de ne pas chercher parmi les grandeurs de ce monde les signes de la venue de Dieu, mais que nous sachions reconnaître la  grandeur des envoyés de Dieu  à travers ces humbles personnes qui ne se mettent pas en première place mais qui nous tournent vers Celui qui vient.

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