Commentaire du 1er juillet 2012 / Pierre Desroches (97e)

– Transcription écrite du commentaire au bas de la page.

– Pierre Desroches est prêtre des paroisses St-Pierre Claver et St-Stanislas de Kostka de Montréal. Il est également aumônier du Service de Police de Montréal et du CHSLD Centre-Ville de Montréal.
– Gino Fillion : caméra, composition de la musique et arrangements, montage des images et mixage.

« Les morts spirituelles qui nous suivent le long de notre histoire / Jaïre reconnaît le pouvoir de Jésus / Jésus n’a pas d’agenda et répond aux demandes ponctuelles / Jésus n’est pas sans recevoir de pression / Une femme qui sort de sa peur et fait un aveu / Nos mains qu’on peut tendre pour faire vivre les nôtres. »

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Évangile : Résurrection de la fille de Jaïre – Guérison d’une femme (Marc 5, 21-43)
Jésus regagna en barque l’autre rive, et une grande foule s’assembla autour de lui. Il était au bord du lac. Arrive un chef de synagogue, nommé Jaïre. Voyant Jésus, il tombe à ses pieds et le supplie instamment : « Ma petite fille est à toute extrémité. Viens lui imposer les mains pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. » Jésus partit avec lui, et la foule qui le suivait était si nombreuse qu’elle l’écrasait. Or, une femme, qui avait des pertes de sang depuis douze ans… — Elle avait beaucoup souffert du traitement de nombreux médecins, et elle avait dépensé tous ses biens sans aucune amélioration ; au contraire, son état avait plutôt empiré — … cette femme donc, ayant appris ce qu’on disait de Jésus, vint par derrière dans la foule et toucha son vêtement. Car elle se disait : « Si je parviens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée. » À l’instant, l’hémorragie s’arrêta, et elle ressentit dans son corps qu’elle était guérie de son mal. Aussitôt Jésus se rendit compte qu’une force était sortie de lui. Il se retourna dans la foule, et il demandait : « Qui a touché mes vêtements ? » Ses disciples lui répondaient : « Tu vois bien la foule qui t’écrase, et tu demandes : ‘Qui m’a touché ?’ » Mais lui regardait tout autour pour voir celle qui avait fait ce geste. Alors la femme, craintive et tremblante, sachant ce qui lui était arrivé, vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité. Mais Jésus reprit : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix et sois guérie de ton mal. » Comme il parlait encore, des gens arrivent de la maison de Jaïre pour annoncer à celui-ci : « Ta fille vient de mourir. À quoi bon déranger encore le Maître ? » Jésus, surprenant ces mots, dit au chef de la synagogue : « Ne crains pas, crois seulement. » Il ne laissa personne l’accompagner, sinon Pierre, Jacques, et Jean son frère. Ils arrivent à la maison du chef de synagogue. Jésus voit l’agitation, et des gens qui pleurent et poussent de grands cris. Il entre et leur dit : « Pourquoi cette agitation et ces pleurs ? L’enfant n’est pas morte : elle dort. » Mais on se moquait de lui. Alors il met tout le monde dehors, prend avec lui le père et la mère de l’enfant, et ceux qui l’accompagnent. Puis il pénètre là où reposait la jeune fille. Il saisit la main de l’enfant, et lui dit : « Talitha koum », ce qui signifie : « Jeune fille, je te le dis, lève-toi ! » Aussitôt la jeune fille se leva et se mit à marcher — elle avait douze ans. Ils en furent complètement bouleversés. Mais Jésus leur recommanda avec insistance que personne ne le sache ; puis il leur dit de la faire manger. 

1ère lecture : Dieu n’a pas fait la mort (Sagesse 1, 13-15; 2, 23-24)
Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. Il a créé toutes choses pour qu’elles subsistent ; ce qui naît dans le monde est bienfaisant, et l’on n’y trouve pas le poison qui fait mourir. La puissance de la mort ne règne pas sur la terre, car la justice est immortelle. Dieu a créé l’homme pour une existence impérissable, il a fait de lui une image de ce qu’il est en lui-même. La mort est entrée dans le monde par la jalousie du démon, et ceux qui se rangent dans son parti en font l’expérience.

Psaume 29, 3-6.12- 13

R/ Je t’exalte, Seigneur, toi qui me relèves;

Quand j’ai crié vers toi, Seigneur,
mon Dieu, tu m’as guéri ;
Seigneur, tu m’as fait remonter de l’abîme
et revivre quand je descendais à la fosse.

Fêtez le Seigneur, vous, ses fidèles,
rendez grâce en rappelant son nom très saint.
Sa colère ne dure qu’un instant,
sa bonté, toute la vie.

Avec le soir, viennent les larmes,
mais au matin, les cris de joie !
Tu as changé mon deuil en une danse,
mes habits funèbres en parure de joie !

Que mon cœur ne se taise pas,
qu’il soit en fête pour toi ;
et que sans fin, Seigneur, mon Dieu,
je te rende grâce !

2ème lecture : La générosité du Christ, motif de la nôtre (2 Corinthiens 8, 7.9.13-15)
Frères, puisque vous avez reçu largement tous les dons : la foi, la Parole et la connaissance de Dieu, cette ardeur et cet amour que vous tenez de nous, que votre geste de générosité soit large, lui aussi. Vous connaissez en effet la générosité de notre Seigneur Jésus Christ : lui qui est riche, il est devenu pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté. Il ne s’agit pas de vous mettre dans la gêne en soulageant les autres, il s’agit d’égalité. En cette occasion, ce que vous avez en trop compensera ce qu’ils ont en moins, pour qu’un jour ce qu’ils auront en trop compense ce que vous aurez en moins, et cela fera l’égalité, comme dit l’Écriture à propos de la manne : Celui qui en avait ramassé beaucoup n’a rien eu de plus, et celui qui en avait ramassé peu n’a manqué de rien.

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Commentaire du 1er juillet 2012(97e) – 13e semaine du Temps Ordinaire (année B)
Transcription : Sœur Cécile Petit, s.c.q.

Jésus tend la main à deux femmes pour signifier qu’il veut guérir l’humanité

L’abbé Pierre Desroches

Bonjour mes amis en ce début du mois de juillet. Alors aujourd’hui nous allons assister à la résurrection d’une fille. Dans notre vie on expérimente de différentes façons la mort, il y a une mort qu’on va expérimenter qu’une fois, c’est la mort physique, mais la mort spirituelle, la mort ontologique, ça nous suit pas mal tout au long de notre histoire. On a beaucoup de textes dans la Bible qui vont nous  parler de cette réalité. Un autre mot pour nous parler de la mort, c’est le péché. Je ne veux pas faire une longue théologie sur le péché, mais dans l’évangile d’aujourd’hui, ce que je trouve très intéressant on va voir deux hommes s’intéresser beaucoup à deux femmes et ce, pour des réalités assez différentes de celles auxquelles nous sommes habitués.

Alors en premier, c’est Jésus qui va regagner en barque l’autre rive. Il va changer de rivage, puis il y a une grande foule qui va être autour de lui. Il est au bord du lac, puis arrive un chef de synagogue, ce qui n’est jamais banal parce qu’un chef de synagogue, c’est d’abord un homme qui a autorité, c’est un homme qui a autorité dans le Temple et c’est très clair que l’identité de Jésus par rapport à ce Temple n’est pas du tout claire.  C’est le Temple qui va vouloir absolument que Jésus soit éliminé. Lui, il s’appelle Jaïre, il voit Jésus et tombe à ses pieds et il lui fait une prière. C’est déjà quelque chose d’assez étonnant que de se mettre à prier un homme. Nous on a deux mille ans de christianisme à l’esprit, alors de prier Jésus, pour nous c’est l’A B C de notre foi, mais pour lui c’est quelque chose.  Il lui dit : « Ma petite fille est à toute extrémité. » Elle est sur le point de mourir, « viens lui imposer les mains ». C’est déjà reconnaître beaucoup de pouvoir  aux mains des Jésus  « pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. » On peut dire que cet homme-là, c’est déjà un chrétien avant la lettre parce qu’il a une reconnaissance de Jésus et ce qui l’ouvre à cette reconnaissance de Jésus, c’est le prix qu’il accorde à sa petite fille. Elle le fait bouger. La maladie de sa petite fille le fait passer à une autre étape.

Et Jésus va partir avec lui. C’est intéressant de voir comment Jésus est ouvert à cet appel, et il ne regarde pas son agenda pour voir s’il peut, s’il ne peut pas, pour voir s’il y a d’autres choses qui l’attend. Il répond immédiatement à cette demande. Et on dit : « il part avec cet homme et la foule qui le suivait était si nombreuse qu’on l’écrasait. »   Ce qui veut dire que Jésus n’était pas sans pression et qu’il était de toutes parts, envahi,  selon l’image que la Parole veut nous dire. On nous parle d’une autre femme qui va venir s’immiscer entre l’urgence de la jeune adolescente et Jésus. Et c’est une femme qui des pertes de sang depuis douze ans. C’est intéressant parce qu’elle, il y a quelque chose qui s’échappe d’elle depuis douze ans et l’autre, a 12 ans d’existence. On a deux fois « douze ans ». Et dans ce qui  vient, la Parole va nous dire, « qu’elle avait consulté beaucoup de médecins », elle avait consulté beaucoup de personnes, avait dépensé tout son argent sans qu’elle soit vraiment guérie, sans qu’il y ait de l’amélioration à son sort. « Elle  vint par derrière dans la foule pour toucher le vêtement de Jésus convaincue  que si elle fait juste toucher son vêtement elle va être guérie. » Et au moment où elle touche le  vêtement, l’hémorragie s’arrête, et elle le ressent dans son corps.

Vous savez, cette femme-là qui est en hémorragie depuis douze ans vit un drame, parce qu’au temps de Jésus, une femme qui a des hémorragies ne peut absolument pas se trouver dans une foule, que toute personne qui la touche fait que religieusement est impure et doit aller se purifier. Je ne sais pas si vous vous souvenez il y a quelques années, lorsqu’on a connu ici à Montréal le drame de la grippe H1N1 et qu’on ne pouvait plus se signer dans les bénitiers de l’église, et que sont apparues toutes les petites bouteilles de purification qu’on retrouve encore un peu partout, qu’on nous a tous invités à recevoir des injections. Une population se met à avoir peur de l’impureté, c’est une population qui perd beaucoup sa liberté. Cette femme savait qu’elle était contagieuse pour les autres et qu’elle aurait dû rester absolument isolée. C’est pourquoi elle va venir de derrière et non pas de devant, et elle va essayer de faire ça à la cachette. Mais là, Jésus sent lui qu’une force est sortie de son être et demande : « Qui m’a touché? » Ses disciples disent « voyons, tout le monde qui est là…comment tu peux faire … » Et cette femme-là va poser un geste extraordinaire, elle va sortir de sa cachette et plutôt que de rester dans sa peur elle va entrer dans un aveu devant Jésus et elle va dire que c’est elle.  Et Jésus va lui dire : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. » 

Il se peut que dans nos vies il y ait des aveux qu’on ne fasse pas, qui nous maintiennent dans la peur et la cachette et qui nous empêchent d’avoir un intérieur qui se vit sous le registre de la paix et la vérité. Je pense qu’à travers cette parole, il y a un tout un appel pour que cette réalité du dedans de chacun de nous se vive, non pas en cachette, mais dans la lumière parce que c’est dans la lumière qu’on peut recevoir la guérison et le salut. Et Jésus va continuer sa marche et on va venir de la maison de notre ami du début, Jaïre, en lui annonçant que sa petite fille est morte, et qu’il n’est plus utile que le Maître se rende dans le lieu, – probablement une autre cachette – parce qu’ils préfèrent qu’Il ne mette pas les pieds dans la demeure par crainte de ce que les autorités pourraient faire à la maison ou pourraient faire aux proches. Jésus dis simplement qu’il continue la route et lorsqu’il arrive à la demeure, il met tout le monde dehors.

C’est intéressant, on pourrait aussi se poser la question, est-ce qu’il y a des gens qui auraient avantage qu’ils soient mis dehors de nos maisons, parce qu’ils entretiennent plus la mort que l’arrivée de la vie, ou que  l’arrivée du salut ? « L’enfant n’est pas morte : elle dort. » Je pense que bien souvent les troubles qu’on peut toucher de nos proches qui ont de la difficulté à mettre debout, à vivre, et à être à la hauteur de leur existence, alors que cette dimension-là, fait qu’on a besoin de sortir les influences malignes, malsaines. « Et il pénètre là où reposait l’enfant avec les parents. » C’est extraordinaire que Jésus n’exclut jamais les parents et que la force – il va se présenter aussi avec ses disciples – et « il saisit la main de l’enfant. » Se pourrait-il que nos proches soient en train de mourir parce qu’on ne leur saisit pas la main, on n’est pas avec eux en lien, et que la coupure que l’on vit avec la réalité difficile fait que seuls, ils ne sont plus capables de retrouver leur sens. Il dit simplement : « Talitha koum, jeune fille, je te le dis, lève-toi ! » Il y a dans notre monde beaucoup d’humanités qui sont appelés à se mettre debout parce que beaucoup d’hommes et de femmes qui, seuls, isolés, coupés des autres, se retrouvent écrasés. Alors que le Seigneur, qui est celui qui nous apporte le salut, nous apprenne à être non simplement ses disciples, mais à être plus que ses disciples, à être de ceux qui incarnent dans l’aujourd’hui du monde, la main que Dieu tend à travers toute cette humanité qu’il aime et qu’il veut guérir. Bonne semaine mes amis et pendant ce temps de vacance, je vous invite à tendre la main et à faire les appels que Dieu veut faire par vous.

 

 

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