Commentaire du 10 avril 2011 / Pierre Desroches (30e)

– Transcription écrite du commentaire au bas de la page. 

– Pierre Desroches est prêtre des paroisses St-Pierre Claver et St-Stanislas de Kostka de Montréal. Il est également aumônier du Service de Police de Montréal et du CHSLD Centre-Ville de Montréal.
– MUSICIENS / Tabla : Subir Dev / Flûte indienne : Catherine Potter / Violon : Véronique Bégin / Caisse claire : David Routhier / Sitar : François Paradis.
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Composition, guitare, caméra et montage : Gino Fillion.

« Nous sommes appelés à sortir de nos tombeaux : la législation, les ruptures, la préoccupation de l’argent… / Être dans l’emprise du Souffle de Dieu et non de la chair / Une humanité malade / L’appel de Dieu à travers nos frères malades / Est-ce que notre amour lie ou libère ? »
– Références pour les textes bibliques (AELF) :  http://aelf.org/?date_my=10/04/2010
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Évangile : Mort et résurrection de Lazare (Jean 11, 1-45)
Un homme était tombé malade. C’était Lazare, de Béthanie, le village de Marie et de sa soeur Marthe. (Marie est celle qui versa du parfum sur le Seigneur et lui essuya les pieds avec ses cheveux. Lazare, le malade, était son frère.) Donc, les deux soeurs envoyèrent dire à Jésus : « Seigneur, celui que tu aimes est malade. » En apprenant cela, Jésus dit : « Cette maladie ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié. » Jésus aimait Marthe et sa soeur, ainsi que Lazare. Quand il apprit que celui-ci était malade, il demeura pourtant deux jours à l’endroit où il se trouvait ; alors seulement il dit aux disciples : « Revenons en Judée. » Les disciples lui dirent : « Rabbi, tout récemment, les Juifs cherchaient à te lapider, et tu retournes là-bas ? » Jésus répondit : « Ne fait-il pas jour pendant douze heures ? Celui qui marche pendant le jour ne trébuche pas, parce qu’il voit la lumière de ce monde ; mais celui qui marche pendant la nuit trébuche, parce que la lumière n’est pas en lui. » Après ces paroles, il ajouta : « Lazare, notre ami, s’est endormi ; mais je m’en vais le tirer de ce sommeil. » Les disciples lui dirent alors : « Seigneur, s’il s’est endormi, il sera sauvé. » Car ils pensaient que Jésus voulait parler du sommeil, tandis qu’il parlait de la mort. Alors il leur dit clairement : « Lazare est mort, et je me réjouis de n’avoir pas été là, à cause de vous, pour que vous croyiez. Mais allons auprès de lui ! » Thomas (dont le nom signifie : Jumeau) dit aux autres disciples : « Allons-y nous aussi, pour mourir avec lui ! » Quand Jésus arriva, il trouva Lazare au tombeau depuis quatre jours déjà. Comme Béthanie était tout près de Jérusalem – à une demi-heure de marche environ – beaucoup de Juifs étaient venus manifester leur sympathie à Marthe et à Marie, dans leur deuil. Lorsque Marthe apprit l’arrivée de Jésus, elle partit à sa rencontre, tandis que Marie restait à la maison. Marthe dit à Jésus : « Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort. Mais je sais que, maintenant encore, Dieu t’accordera tout ce que tu lui demanderas. » Jésus lui dit : « Ton frère ressuscitera. » Marthe reprit : « Je sais qu’il ressuscitera au dernier jour, à la résurrection. » Jésus lui dit : « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; et tout homme qui vit et qui croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? » Elle répondit : « Oui, Seigneur, tu es le Messie, je le crois ; tu es le Fils de Dieu, celui qui vient dans le monde. » Ayant dit cela, elle s’en alla appeler sa soeur Marie, et lui dit tout bas : « Le Maître est là, il t’appelle. » Marie, dès qu’elle l’entendit, se leva aussitôt et partit rejoindre Jésus. Il n’était pas encore entré dans le village ; il se trouvait toujours à l’endroit où Marthe l’avait rencontré. Les Juifs qui étaient à la maison avec Marie, et lui manifestaient leur sympathie, quand ils la virent se lever et sortir si vite, la suivirent, pensant qu’elle allait au tombeau pour y pleurer. Elle arriva à l’endroit où se trouvait Jésus ; dès qu’elle le vit, elle se jeta à ses pieds et lui dit : « Seigneur, si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort. » Quand il vit qu’elle pleurait, et que les Juifs venus avec elle pleuraient aussi, Jésus fut bouleversé d’une émotion profonde. Il demanda : « Où l’avez-vous déposé ? » Ils lui répondirent : « Viens voir, Seigneur. » Alors Jésus pleura. Les Juifs se dirent : « Voyez comme il l’aimait ! » Mais certains d’entre eux disaient : « Lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle, ne pouvait-il pas empêcher Lazare de mourir ? » Jésus, repris par l’émotion, arriva au tombeau. C’était une grotte fermée par une pierre. Jésus dit : « Enlevez la pierre. » Marthe, la soeur du mort, lui dit : « Mais, Seigneur, il sent déjà ; voilà quatre jours qu’il est là. » Alors Jésus dit à Marthe : « Ne te l’ai-je pas dit ? Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu. » On enleva donc la pierre. Alors Jésus leva les yeux au ciel et dit : « Père, je te rends grâce parce que tu m’as exaucé. Je savais bien, moi, que tu m’exauces toujours ; mais si j’ai parlé, c’est pour cette foule qui est autour de moi, afin qu’ils croient que tu m’as envoyé. » Après cela, il cria d’une voix forte : « Lazare, viens dehors ! » Et le mort sortit, les pieds et les mains attachés, le visage enveloppé d’un suaire. Jésus leur dit : « Déliez-le, et laissez-le aller. » Les nombreux Juifs, qui étaient venus entourer Marie et avaient donc vu ce que faisait Jésus, crurent en lui.

1ère lecture : Le peuple mort va revivre (Ézéchiel 37, 12-14)
Ainsi parle le Seigneur Dieu : Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai sortir, ô mon peuple, et je vous ramènerai sur la terre d’Israël. Vous saurez que je suis le Seigneur, quand j’ouvrirai vos tombeaux et vous en ferai sortir, ô mon peuple ! Je mettrai en vous mon esprit, et vous vivrez ; je vous installerai sur votre terre, et vous saurez que je suis le Seigneur : je l’ai dit, et je le ferai. – Parole du Seigneur.

Psaume 129, 1-2, 3-4, 5-6ab, 7bc-8
R/ Auprès du Seigneur est la grâce, la pleine délivrance

Des profondeurs je crie vers toi, Seigneur,
Seigneur, écoute mon appel !
Que ton oreille se fasse attentive
au cri de ma prière !

Si tu retiens les fautes, Seigneur,
Seigneur, qui subsistera ?
Mais près de toi se trouve le pardon
pour que l’homme te craigne.

J’espère le Seigneur de toute mon âme ;
je l’espère, et j’attends sa parole.
Mon âme attend le Seigneur
plus qu’un veilleur ne guette l’aurore.

Oui, près du Seigneur, est l’amour ;
près de lui, abonde le rachat.
C’est lui qui rachètera Israël
de toutes ses fautes. 

2ème lecture : Celui qui a ressuscité Jésus vous donnera la vie (Romains 8, 8-11)
Frères, sous l’emprise de la chair, on ne peut pas plaire à Dieu. Or, vous, vous n’êtes pas sous l’emprise de la chair, mais sous l’emprise de l’Esprit, puisque l’Esprit de Dieu habite en vous. Celui qui n’a pas l’Esprit du Christ ne lui appartient pas. Mais si le Christ est en vous, votre corps a beau être voué à la mort à cause du péché, l’Esprit est votre vie, parce que vous êtes devenus des justes. Et si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts donnera aussi la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous.

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Commentaire du 10 avril 2011 (30è) – 5e dimanche du Carême (année A)
Transcription : Sœur Cécile Petit, s.c.q.

Lazare : ces frères qui ne peuvent retrouver la vie que par nous

L’abbé Pierre Desroches

Alors mes amis, on avance sérieusement en Carême et aujourd’hui les Paroles viennent soutenir et accompagner notre marche. La première lecture est d’Ézéchiel qui reçoit une Parole qui dit : « Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai sortir ô mon peuple ». Pour moi, l’écho que cela fait à mon oreille c’est le peuple qui est mort. Je dois vous dire que comme enfant, j’ai eu ce sentiment-là ou comme jeune adulte, je voyais mon peuple mourir, je voyais les valeurs de mon peuple disparaître peu à peu et je me demandais même si Dieu avait abandonné cette terre. C’est très mal connaître Dieu que de penser que Dieu peut abandonner. Dieu fait toujours route avec nous et cette belle Parole d’Ézéchiel, c’est une Parole qui va faire revivre ce peuple, qui va le recentrer sur son espérance. Je pense que cette espérance est légitime pour nous aujourd’hui. Nous sommes appelés à sortir de nos tombeaux. Il y a toutes sortes de tombeaux dans lesquels nous sommes enlisés. J’ai vu peu à peu prendre beaucoup de place, la  législation, dans toutes nos vies familiales, dans nos vies intimes; j’ai vu de plus en plus de ruptures nous appeler à des accusations mutuelles; j’ai vu l’argent prendre énormément de place aussi dans les préoccupations des personnes, comme si l’argent pouvait nous donner la vie et non nous, donner la vie à l’argent. Les appels que le Seigneur fait, c’est un bon temps au moment du Carême pour revoir un peu nos positions et revoir ce qui dans nos vies est une priorité. Le texte ne vient pas nous juger, il vient nous appeler, il vient nous encourager à nous laisser transformer par un Esprit qui donne la vie.

C’est ce dont va nous parler la deuxième lecture. Paul nous dit : « Frères, sous l’emprise de la chair, on ne peut pas plaire à Dieu. Or vous, vous n’êtes pas sous l’emprise de la chair, mais sous l’emprise de l’Esprit. » On peut souvent être découragé de ce qui monte en nous ou des désirs qui peuvent venir de notre chair. On peut croire qu’ils nous condamnent ou qu’ils nous jugent, alors que Paul porte un regard tout neuf et il dit que nous ne sommes pas sous cette emprise. L’emprise sous laquelle vous êtes c’est l’emprise du souffle de Dieu et ce souffle nous est donné gratuitement chaque jour, c’est à nous; on se tourne vers Lui, notre cœur est fait pour l’accueillir. Alors il ne faut pas nous décourager de nos péchés mais de savoir que nos péchés nous propulsent vers Celui qui va nous donner ce Souffle pour qu’on soit des vainqueurs.

Et dans l’Évangile, c’est un très long évangile qui nous dit qu’il y a un frère malade, un homme malade et on pourrait comprendre qu’il y a une humanité malade. Et il y a une très belle Parole que les deux sœurs vont envoyer dire à Jésus c’est : « Seigneur, celui que tu aimes est malade.» Et non pas Seigneur, mon frère est un malade. Ce qui est affirmé en premier, c’est l’amour du Seigneur pour cette humanité malade. Et je pense que c’est toute une disposition et une attitude de cœur qui peuvent rendre possibles de grandes transformations. Jésus va s’adresser à ses disciples et il va dire : « retournons en Judée.»  Lorsqu’il va arriver en Judée, notre ami Lazare est mort. Alors on voit une de ses sœurs se lever et venir à sa rencontre. La mort de nos frères… Il y a  la mort physique, mais la mort ontologique qui la mort de l’être; quand quelqu’un est enveloppé de tristesse, d’angoisse, quand quelqu’un est en dépression – je ne vous nommerai pas toutes les possibilités de ce qui rend le cœur malade et l’être malade, –  mais quand nos frères sont malades, est-ce que d’abord on sait et on reconnaît qu’ils sont aimés ? Est-ce qu’on se lève pour aller à la rencontre du Seigneur ? Est-ce que c’est pour nous une occasion de vivre un temps d’intimité avec Celui qui est le Maître de la vie mais qui est aussi le Maître de la mort ?

Alors, Marthe part, et va à la rencontre du Seigneur. La  première prière qu’elle lui fait, la première phrase qu’elle va lui dire « Seigneur, si tu avais été là mon frère ne serait pas mort. »  Ce qu’elle affirme, c’est comme une absence et on va assister à un très bref dialogue que va nous donner l’Évangile, et ce qui est fort passionnant, c’est que lorsque Marthe va quitter le Seigneur et qu’elle va aller à la rencontre de sa sœur, elle va lui dire : « Le Maître est là et il t’appelle.» Elle est partie d’un sentiment d’absence à une reconnaissance de présence. Est-ce que dans nos frères malades le Seigneur est là et qu’il nous appelle ? Est-ce que pour nous, ça devient un appel de Dieu ? Et Marie va arriver auprès de Jésus et elle va lui dire : « Seigneur, si tu avais été là mon frère ne serait pas mort. » C’est à la fois la conviction de la puissance de Jésus, mais c’est aussi comme un doute sur sa présence. Le texte va nous dire : « il n’était pas encore entré dans la ville, il se trouvait toujours à l’endroit où Marthe l’avait rencontré. » Cet évangile est particulier parce qu’il nous parle souvent du lieu où se trouve Jésus mais jamais sans le nommer clairement. Jésus va interpeller la foi de cette seconde sœur et lui dire que même ceux qui sont morts et qui croient en Lui, vivront. Et d’une voix forte il appelle Lazare et lui dit : « Lazare, viens dehors, » et celui-ci sort le visage couvert d’un suaire. Je pense que ce sont les caractéristiques de ce qui nous détruit comme être c’est de nous rendre le visage pâle comme la mort, et que nos frères qui sont souvent attristés n’ont même plus de vie dans les traits physiques de ce lieu d’une expression extraordinaire qu’est le visage.

« Il sort couvert d’un suaire et les pieds et les mains attachés. Il y a une image très forte pour moi parce que quand on a les pieds et les mains liés on ne peut plus du tout suffire à nous-mêmes, on ne peut être conduit que là où on ne veut pas aller, on est privé de cette autonomie qui fait qu’on peut être des hommes et des femmes à part entière. Est-ce qu’on n’aurait pas une forme d’amour qui serait un amour qui lie plutôt qu’un amour qui libère ? « Déliez-le et laissez-le aller, » c’est le grand appel que Jésus va faire à ces deux sœurs qui avaient peut-être enfermées dans un amour possessif, pour protéger quelqu’un qui avait besoin d’être révélé à lui-même. Et on nous dit « que Lazare retrouva la vie. » Probablement que cette Parole nous dit que nous aussi on peut rendre possible que des frères retrouvent la vie par un appel, eux qui vivent comme des morts. Bonne semaine et je vous souhaite de pouvoir vivre cette expérience qui conduit à la joie de Pâques.

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