Commentaire du 19 février 2012 / Pierre Desroches (77e)

– Transcription écrite du commentaire au bas de la page. 

– Pierre Desroches est prêtre des paroisses St-Pierre Claver et St-Stanislas de Kostka de Montréal. Il est également aumônier du Service de Police de Montréal et du CHSLD Centre-Ville de Montréal.

– Gino Fillion : caméra, composition de la musique et arrangements, direction des comédiens, montage des images / Anne-Sylvie Gosselin : narratrice / Jean-François Lépine : Jésus /André Raymond : le paralytique.

« Le propre de Dieu est d’être dans la vie qui surgit / Notre tendance à se plaindre plutôt qu’être dans la reconnaissance / Le mal nous fait réduire les autres de sujets à objets / Dieu nous parle de l’intérieur, au plus intime de nous-mêmes / Lorsque nos péchés sont pardonnés, on peut retrouver le sens de la marche et de la vie. »

– Références pour les textes bibliques (AELF) : http://aelf.org/?date_my=19/02/2012

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Évangile : Guérison d’un paralysé, signe du pardon des péchés (Marc 2, 1-12)
Jésus était de retour à Capharnaüm, et la nouvelle se répandit qu’il était à la maison. Tant de monde s’y rassembla qu’il n’y avait plus de place, même devant la porte. Il leur annonçait la Parole. Arrivent des gens qui lui amènent un paralysé, porté par quatre hommes. Comme ils ne peuvent l’approcher à cause de la foule, ils découvrent le toit au-dessus de lui, font une ouverture, et descendent le brancard sur lequel était couché le paralysé. Voyant leur foi, Jésus dit au paralysé : « Mon fils, tes péchés sont pardonnés. » Or, il y avait dans l’assistance quelques scribes qui raisonnaient en eux-mêmes : « Pourquoi cet homme parle-t-il ainsi ? Il blasphème. Qui donc peut pardonner les péchés, sinon Dieu seul ? » Saisissant aussitôt dans son esprit les raisonnements qu’ils faisaient, Jésus leur dit : « Pourquoi tenir de tels raisonnements ? Qu’est-ce qui est le plus facile ? de dire au paralysé : ‘Tes péchés sont pardonnés’, ou bien de dire : ‘Lève-toi, prends ton brancard et marche’ ? Eh bien ! Pour que vous sachiez que le Fils de l’homme a le pouvoir de pardonner les péchés sur la terre, je te l’ordonne, dit-il au paralysé : Lève-toi, prends ton brancard et rentre chez toi. » L’homme se leva, prit aussitôt son brancard, et sortit devant tout le monde. Tous étaient stupéfaits et rendaient gloire à Dieu, en disant : « Nous n’avons jamais rien vu de pareil. » 

1ère lecture : Dieu pardonne les péchés d’Israël (Isaïe 43, 18-19.21-22.24c-25)
Parole du Seigneur : Ne vous souvenez plus d’autrefois, ne songez plus au passé. Voici que je fais un monde nouveau : il germe déjà, ne le voyez-vous pas ? Oui, je vais faire passer une route dans le désert, des fleuves dans les lieux arides. Ce peuple que j’ai formé pour moire dira ma louange. Toi, Jacob, tu ne m’avais pas appelé, tu ne t’étais pas fatigué pour moi, Israël ! Par tes péchés tu m’as traité comme un esclave, par tes fautes tu m’as fatigué. Mais moi, oui, moi, je pardonne tes révoltes, à cause de moi-même, et je ne veux plus me souvenir de tes péchés.

Psaume 40, 2-6.11-13

R/ Guéris mon âme, Seigneur, car j’ai péché contre toi

Heureux qui pense au pauvre et au faible :
le Seigneur le sauve au jour du malheur !
Il le protège et le garde en vie,
Il le soutient sur son lit de souffrance.

J’avais dit : « Pitié pour moi, Seigneur,
guéris-moi, car j’ai péché contre toi ! »
Mes ennemis me condamnent déjà :
« Quand sera-t-il mort ? son nom, effacé ? »

Mais toi, Seigneur, prends pitié de moi,
et je saurai que tu m’aimes.
Dans mon innocence tu m’as soutenu
et rétabli pour toujours devant ta face.

2ème lecture : Le « oui » du Christ commande notre loyauté (2 Corinthiens 1, 18-22)
Frères, j’en prends à témoin le Dieu fidèle : le langage que nous vous parlons n’est pas à la fois « oui » et « non ». Le Fils de Dieu, le Christ Jésus, que nous avons annoncé parmi vous, Silvain, Timothée et moi, n’a pas été à la fois « oui » et « non » ; il n’a jamais été que « oui ». Et toutes les promesses de Dieu ont trouvé leur « oui » dans sa personne. Aussi est-ce par le Christ que nous disons « amen », notre « oui », pour la gloire de Dieu. Celui qui nous rend solides pour le Christ dans nos relations avec vous, celui qui nous a consacrés, c’est Dieu ; il a mis sa marque sur nous, et il nous a fait une première avance sur ses dons : l’Esprit qui habite nos cœurs.

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Commentaire du 19 février (77è) – 7e dimanche du Temps Ordinaire (année B)
Transcription : Sœur Cécile Petit, s.c.q.

Nos désordres et paralysies ne font pas peur à Dieu

L’abbé Pierre Desroches

Je suis très heureux de vous accueillir cette semaine et j’ai une petite annonce à vous faire de départ. Suite à la prédication ce matin, nous aurons le texte de l’évangile qui sera lu et  qui conclura maintenant chacun de ces brefs commentaires que je fais semaine après semaine.

Cette semaine la liturgie  nous propose un texte d’Isaïe, texte que je trouve excessivement touchant. Je vous lis la première phrase. « Ne vous souvenez plus d’autrefois, ne songez plus au passé. » C’est intéressant, c’est le Seigneur qui dit cela. Vous savez comment on a tendance à s’enfermer dans le passé. Ce texte-là va aborder la question du péché, va aborder la question de la révolte qui est dans nos cœurs, souvent l’incompréhension qui nous fait vivre une relation un peu toute confuse avec ce Seigneur de l’univers. C’est lui qui dit : « Ne vous rappelez plus de cela, ne vous enfermez pas dans cette dimension. Voici que je fais un monde nouveau ». C’est bien le propre de Dieu d’être toujours dans neuf, dans la vie, qui peut surgir même de lieux où elle a été fortement éprouvée. Il fait cette grande invitation : « Je vais faire passer une route dans le désert, des fleuves dans des lieux arides. » Je pense que pour les liens conjugaux ça peut être extraordinaire  parce que parfois nos alliances deviennent des déserts qui nous assèchent, puis  nos terres sont aussi très sèches, alors c’est comme s’il dit : « je vais faire passer la vie, je vais faire passer le souffle. 

« Ce peuple que j’ai formé pour moi, dira ma louange ». Dire la louange ça parait peut-être  très simple mais c’est avoir un cœur reconnaissant. On a plus facilement tendance à la déprime, à se plaindre ou à gémir. Dire la louange c’est un signe extraordinaire d’un cœur qui est allégé, d’un cœur qui est ouvert, d’un cœur qui est confiant. « Toi, Jacob, tu ne m’avais pas appelé, tu ne t’étais pas fatigué pour moi, Israël ! Par tes péchés tu m’as traité comme un esclave ». C’est extraordinaire. Dieu dit : «  Tu m’as traité comme un esclave… » C’est la réalité du mal dans nos vies. Il nous fait réduire souvent les autres de sujets à objets, comme s’ils étaient à notre service et qu’on pouvait les utiliser pour satisfaire nos besoins les plus primaires. C’est comme si Dieu dit : « c’est ça que tu fais avec moi »… et c’est lui qui dit : « ne t’enferme pas, ne te souviens plus d’autrefois. » Grande leçon d’humilité et grande leçon d’amour. « Et à cause de moi-même, je ne veux plus me souvenir de tes péchés. »  Je pense que Dieu les oublie beaucoup plus vite que nous. On reste souvent enfermés dedans, c’est pourquoi on avait créé ce très beau mot, dire que le péché nous mettait en enfer et qu’il nous coupait de toute ouverture et de toute projection dans une vie nouvelle. C’est comme si on ne pouvait que répéter les bêtises que l’on a faites, alors que la conviction de Dieu, c’est qu’on peut faire du neuf avec Lui en épousant constamment cette confiance qu’il nous accorde, cette reconnaissance qu’il a de chacun de nous.

Et dans l’Évangile, l’image qui nous est donnée aujourd’hui c’est celle du paralytique. On dit « que Jésus était de retour à Capharnaüm, et la nouvelle se répandit qu’il était à la maison. » J’aime toujours  cette image là car j’entends toujours ma mère qui me disait quand j’étais plus jeune : « Ta chambre est un vrai capharnaüm ! ». Je ne pouvais pas satisfaire facilement à toutes les attentes d’ordre qu’avait ma mère. J’avais un peu plus de désordre. Et on nous disait aussi quand j’étais jeune que, dans le désordre Jésus sortait de nous. Jésus n’aimait pas le désordre. J’ai même vu ça parfois dans des collèges que j’ai fréquentés. Sur les murs c’était marqué : « Dieu aime l’ordre. » C’est comme si lorsqu’on n’était pas dans l’ordre, Dieu n’était pas avec nous. Le texte nous dit que « Jésus rentre à Capharnaüm. » Ceci pour moi est fort intéressant. Nos désordres ne lui font pas peur. « Et la nouvelle se répand qu’il est dans la maison ». La maison n’est pas vide, la maison est habitée, elle a une présence, mais pas n’importe laquelle, celle même de Jésus. Et on dit que « tout le monde se rassemble tellement qu’il n’y a même plus de place, pas même devant la porte ». Et une porte c’est ce qu’on utilise pour entrer et pour sortir. Lorsqu’il n’y a plus de place devant la porte c’est comme s’il n’y a plus d’échange entre l’intérieur et l’extérieur, c’est comme si c’est coupé. Il n’y a plus d’accès.

Qu’est-ce qui se passe dans cette situation? Lui, il leur annonce la Parole. La Parole n’est pas annoncée du dehors, elle est annoncée du dedans. C’est une image forte. Je pense que c’est une grande vérité, je pense qu’avant de nous parler de l’extérieur dans des livres ou dans des visionnements,  il nous parle au plus intime de nous-même, et cette  Bonne Nouvelle, c’est aussi qu’il est en chacun de nous. Qu’est-ce qui se passe dans  cet évangile du paralytique ? Les gens ne pouvant pas apporter cet homme devant Jésus parce que tout est bouché, ils décident de prendre l’escalier, de monter sur le toit, et une belle expression qu’on va retrouver,  « de faire une ouverture et de descendre le brancard sur lequel était couché le paralytique. » Ces hommes veulent vraiment conduire le paralytique à Jésus. C’est souvent ce que fait le désordre dans nos vies. Il nous paralyse, il nous rend inaptes, incapables de marcher, incapables de fonctionner, incapables d’aimer. Premier geste qu’ils font après avoir fait l’effort de monter cet homme sur le toit, c’est de faire l’ouverture. C’est un bel appel pour les éducateurs que nous sommes de faire ces ouvertures  pour nos frères et nos sœurs, après avoir accepté de les porter. Ce n’est pas toujours évident d’accepter de porter les uns ou de porter les autres, pas plus que de se laisser porter. Jésus voyant la foi des porteurs va dire au paralytique : « Tes péchés te sont pardonnés ».  Ce désordre ne viendra pas fermer toutes les possibilités de vie qui sont en toi, toutes les possibilités d’aimer et d’être aimé, de partager cet amour.

Et dans l’assistance, il y avait là des hommes qui récriminaient, qui raisonnaient en eux-mêmes. C’est important ce qui se passe en nous-même, ce qui bouge en nous-même, ça peut nous ouvrir, ça peut nous fermer, ça peut nous couper, ça peut nous enfermer. Ils n’expriment pas ce qui bouge en eux-mêmes, ces hommes-là, c’est Jésus qui va les interpeler et qui va leur dire : « Pourquoi tenir de tels raisonnements? » Ils disaient : « Qui est-il, il blasphème, qui donc peut pardonner les péchés, sinon Dieu seul ? »  Il dit ceci aux hommes : « Qu’est-ce qui est le plus facile ? de dire au paralysé : <Tes péchés sont pardonnés>, ou bien de dire : <Lève-toi, prends ton brancard et marche> ? Pour les hommes c’est bien sûr que ce qui est le plus facile c’est de  dire que « tes péchés sont pardonnés » parce qu’on n’a pas beaucoup de moyens d’aller vérifier du dedans.  Alors, ils ne répondent pas vraiment à la question, mais Jésus la pose. Et dans le fond, c’est à nous qu’il la pose. Il dit au paralysé : « je te l’ordonne, lève-toi, prends ton brancard et va dans ta maison. » 

Lorsqu’un paralytique ou un paralysé se met à marcher, tout le monde est sidéré. On a de la misère à croire, on ne sait pas comment ça se fait, comment ça s’est réalisé, mais lorsqu’on le voit,  on est stupéfait. L’expérience que Jésus veut  nous faire saisir, c’est que lorsque nos péchés sont pardonnés, on peut retrouver le sens de la vie, on peut retrouver le sens de la marche, on peut retrouver le sens de nos liens. Et ce paralytique,  avec son brancard, va retourner dans sa maison.

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