Commentaire du 20 février 2011 / Pierre Desroches (23e)

Pierre Desroches est prêtre des paroisses St-Pierre Claver et St-Stanislas de Kostka de Montréal.
Gino Fillion : composition, guitare, caméra et montage.

Textes liturgiques © AELF

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Évangile : Sermon sur la montagne. Aimez vos ennemis, soyez parfaits comme votre Père céleste (Matthieu 5, 38-48)
Comme les disciples s’étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait : « Vous avez appris qu’il a été dit : Oeil pour oeil, dent pour dent. Eh bien moi, je vous dis de ne pas riposter au méchant ; mais si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui encore l’autre. Et si quelqu’un veut te faire un procès et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau. Et si quelqu’un te réquisitionne pour faire mille pas, fais-en deux mille avec lui. Donne à qui te demande ; ne te détourne pas de celui qui veut t’emprunter. Vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est dans les cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? Les publicains eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? Les païens eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Vous donc, soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. »

1ère lecture : Tu aimeras ton prochain, car je suis saint (Lévites 19, 1-2.17-18)
Le Seigneur adressa la parole à Moïse : « Parle à toute l’assemblée des fils d’Israël ; tu leur diras : Soyez saints, car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint. Tu n’auras aucune pensée de haine contre ton frère. Mais tu n’hésiteras pas à réprimander ton compagnon, et ainsi tu ne partageras pas son péché. Tu ne te vengeras pas. Tu ne garderas pas de rancune contre les fils de ton peuple. Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Je suis le Seigneur ! »

Psaume 102, 1-2, 3-4; 8.10, 12-13
R/ Le Seigneur est tendresse et pitié.

Bénis le Seigneur, ô mon âme,
bénis son nom très saint, tout mon être !
Bénis le Seigneur, ô mon âme,
n’oublie aucun de ses bienfaits !

Car il pardonne toutes tes offenses
et te guérit de toute maladie ;
il réclame ta vie à la tombe
et te couronne d’amour et de tendresse.

Le Seigneur est tendresse et pitié,
lent à la colère et plein d’amour ;
il n’agit pas envers nous selon nos fautes,
ne nous rend pas selon nos offenses.

Aussi loin qu’est l’orient de l’occident,
il met loin de nous nos péchés ;
comme la tendresse du père pour ses fils,
la tendresse du Seigneur pour qui le craint !

2ème lecture : La sagesse véritable: appartenir tous ensemble au Christ (1 Corinthiens 3, 16-23)
Frères, n’oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous. Si quelqu’un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira ; car le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c’est vous. Que personne ne s’y trompe : si quelqu’un parmi vous pense être un sage à la manière d’ici-bas, qu’il devienne fou pour devenir sage. Car la sagesse de ce monde est folie devant Dieu. L’Écriture le dit : C’est lui qui prend les sages au piège de leur propre habileté. Elle dit encore : Le Seigneur connaît les raisonnements des sages : ce n’est que du vent ! Ainsi, il ne faut pas mettre son orgueil en des hommes dont on se réclame. Car tout vous appartient, Paul et Apollos et Pierre, le monde et la vie et la mort, le présent et l’avenir : tout est à vous, mais vous, vous êtes au Christ, et le Christ est à Dieu.

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Commentaire du 20 février 2011 (23e) – 7e dimanche du Temps Ordinaire (année A)
Transcription : Sœur Cécile Petit, s.c.q.

La sainteté n’est pas accordée à la Loi, mais à l’amour

L’abbé Pierre Desroches

Bonjour ! Aujourd’hui, la première Parole est tirée du Livre des Lévites, de la tribu de Lévi qui était formée des fils du sacerdoce au temps de Jésus.  « Tu aimeras ton prochain car je suis saint ». La sainteté ne semble pas du tout accordée à la Loi, elle semble accordée davantage à l’amour. Dans la  sainteté, c’est comme si ce titre nous disait que nous allons avoir ou expérimenter la sainteté, en étant vraiment dans cet amour que Dieu nous propose. Il nous propose d’aimer notre prochain. Et la Parole qu’il adresse à l’assemblée des fils d’Israël à travers Moïse, nous dit ceci : « Tu n’auras aucune pensée de haine contre ton frère, tu n’hésiteras pas à réprimander ton compagnon, ainsi tu ne partageras pas son péché ». Je ne suis pas sûr que cette phrase a toujours été très bien comprise, très bien saisie. Je me souviens quand j’étais plus jeune, parce ça s’est transformé avec les années, mais souvent j’avais des amis qui étaient religieux et qui étaient même supérieurs de communautés. Certains avaient l’impression qu’ils avaient à répondre personnellement du salut et du péché de ceux qui leur était confiés. Parfois, ils devenaient excessivement rigides parce qu’ils se croyaient investis de ce pouvoir et de cette responsabilité de voir plus à la perfection qu’à la sainteté de ceux qui leur étaient confiés.

De ne pas partager le péché, ça ne veut pas dire de porter un jugement, de porter une condamnation, ou d’essayer de contrôler. Ne pas partager le péché, c’est de ne pas se lier à la dimension trompée de la personne qui peut être proche de nous. Et dans la première partie de ce verset : « tu n’hésiteras pas à réprimander ton compagnon », ce n’est pas à l’écraser, ce n’est pas à le mépriser, c’est à le réprimander. Mais un coup que l’on a dit ou partagé les convictions qui sont les nôtres, il y a tout un respect par rapport envers l’être qui lui, va avoir à vivre son propre discernement et à retrouver son chemin si ce chemin-là il l’a perdu ou il s’en est égaré. « Tu ne te vengeras pas, tu ne garderas pas de rancune contre les fils de ton peuple, et tu aimeras ton prochain comme toi-même, je suis le Seigneur. » C’est une belle description de Dieu, qu’on essaie toujours  d’approcher, mais on sait tout le travail qu’on a pour ne pas se venger, du travail qu’on a pour ne pas garder de rancune. On se tourne souvent plutôt vers soi que de se tourner vers Dieu. Mais Dieu, constamment, ne se détourne pas de nous pour qu’on puisse en arriver à  devenir un peu plus à son image et à sa ressemblance.

Et dans la très belle lecture de Paul aux Corinthiens, cette semaine il est écrit : « N’oubliez pas que vous êtes le Temple de Dieu ». Ce matin, on est dans un temple extraordinaire mais le vrai temple de Dieu ce ne sont pas les pierres qu’on peut voir ou la beauté qui nous entoure, le vrai temple de Dieu c’est la communauté, ce sont les personnes.  « Et l’Esprit de Dieu habite en vous ». Ça c’est une expérience. Et « si quelqu’un détruit ce temple, Dieu le détruira ». C’est une Parole forte. Là aussi, il faut se demander de quoi il s’agit. « Car le Temple de Dieu est sacré, le temple, c’est vous ». Détruire notre prochain, détruire nos frères, c’est impossible que ce soit une voie de réalisation et d’accomplissement. La destruction qu’on peut faire d’un semblable va nécessairement avoir une conséquence. C’est que nous-mêmes, par cette attitude, on va détruire ce qu’il y a de grand et de saint en nous. Ce n’est pas la volonté de Dieu que l’on soit détruit. Tout le contraire nous est enseigné longuement par Jésus Christ et même dans son incarnation. Jésus, sur la croix jamais ne va inviter à ce qu’il y ait une quelconque destruction. La seule destruction qui est en train de se faire, c’est la  sienne, la sienne à laquelle il consent, non pas par faiblesse, non pas par peur, mais par une sagesse que l’évangile veut nous apprendre jour après jour, semaine après semaine,  et que Dieu veut nous apprendre d’une façon très particulière en nous invitant à prendre notre position de fils.

L’évangile qui va être tirée du livre de Matthieu qui est le Sermon sur la Montagne, nous dit : « Vous avez appris, on vous a dit, œil pour œil, dent pour dent, moi, je vous dis de ne pas riposter au mauvais ». Derrière moi vous pouvez entrevoir une figuration de Marguerite Bourgeoys. Marguerite a eu,  dans sa mission de s’en venir ici, quand même des situations à braver. Elle a été très audacieuse. Une des audaces qu’on mesure très mal c’était de partir de la Champagne, qui était de sa région d’origine, pour s’en venir à Paris, et elle avait à voyager seule. Mais à l’époque, les seules qui voyageaient seules comme femmes, c’était des prostituées. Alors nécessairement, la réputation de Marguerite à l’époque n’avait pas beaucoup dépassé sa paroisse ou son village. Alors dans toute la route qu’elle va faire vers Paris, on va avoir une perception de cette jeune femme qui est seule. Et on sait que dans l’auberge où elle va arrêter pour se coucher, on va essayer d’aller dans sa chambre la visiter. Elle va avoir mis des meubles et va s’être protégée. Marguerite ne s’est pas mise à juger ou à condamner ou à porter de grandes accusations sur ces hommes qu’elle voyait tout le long de son chemin.

Et on sait que dans la traversée qu’elle a faite pour s’en venir ici qui durait à peu près deux ou trois mois, tous les gens du bateau sont tombés malades. Elle a été debout pour les soigner. Et il faut comprendre que sur ce bateau-là aussi, qu’elles n’étaient pas nombreuses comme femmes. Je ne me souviens de la traversée. Je sais qu’elle en a fait avec Jeanne Mance, mais je crois que dans la première, elle était passablement seule comme femme et elle s’est mise au service de tous ces gens qui n’avaient pas nécessairement été très bons ou qui n’avaient pas porté sur elle un regard qui était très juste. Mais dans tout son comportement et ses attitudes on peut découvrir une femme qui se reçoit de Dieu et qui reçoit les autres de Dieu. Ce qui est très original, c’est lorsqu’elle est arrivée ici, elle venait pour l’éducation des enfants, mais il n’y en avait pas encore puisqu’il n’y avait pratiquement que des hommes qui n’avaient pas encore reçu d’épouses, puisqu’ils étaient en train d’établir la colonie. Et ce n’était pas d’abord une affaire de femmes, c’était beaucoup une affaire d’hommes. Elle va descendre de ce bateau et après tout ce qu’elle a traversé, elle aura à faire face à cette réalité. Plutôt que d’entrer dans la vengeance ou dans des murmures, elle va se lever les mains et va devenir partenaire de l’établissement de cette colonie.

« Tu aimeras ton prochain, tu haïras ton ennemi et moi je vous dis d’aimer vos ennemis ». Les ennemis ça peut être nous-mêmes. Alors le Seigneur nous invite à aimer parfois, ce qui en nous, ne serait pas aimable. Et aimer les ennemis, c’est une disposition qui est impossible pour le cœur humain. Il devient possible uniquement dans une expérience qui est celle du cœur de Dieu qui nous est vraiment signifiée à travers cette réalité de cette personne qui est Jésus-Christ. Je pense que Marguerite lorsqu’elle va arriver ici, elle va trouver en Monsieur de Maisonneuve une personne en qui elle aura vraiment un ami, mais sûrement qu’elle va trouver sur sa route des expériences qui auraient pu l’emmener ailleurs. Mais l’histoire nous rapporte qu’elle a été considérée comme la mère de cette colonie et qu’elle a vraiment été un témoin d’amour du début à la fin. Je pense que notre vie, notre mission de croyants et de chrétiens, notre mission dans ce monde est de signifier, par notre chair et notre être, cet amour, même dans les situations où ça peut devenir un grand défi; pas à partir de nos forces, mais à partir de la force de Celui qui nous habite, qui nous choisit et qui nous envoie.

Évangile : Matthieu 5, 38-48

1ère lecture : Lévitique 19, 1-2, 17-18

Psaume 102, 1-4, 8.10.12-13

2ème lecture : 1 Corinthiens 3, 16-23

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1 commentaire

  1. Roux Denis dit :

    Je viens de découvrir votre site et j’ai bien goûté vos commentaires sur la Parole de DIeu: belle simplicité, bons liens avec la vie,explications simples de la Parole de Dieu. Merci. Denis

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